Commentaire

Pedro Drapela

Sebastian Lecaros

Benjamin Miranda

Jorge Diaz

Mario Escoba

 

                L’île des esclaves est une comédie, représentée par première fois le cinq mars 1975 à l’Hôtel de Bourgogne de Paris et écrite par le journaliste, romancier et dramaturge français Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux, ou Marivaux né le 4 février 1688 et mort le 12 février 1763. Cette période peut s’ encadrer dans le XVIII siècle, le « Siècle des Lumières » où les idéales à l’origine de la postérieure Révolution Française commencent à surgir et à inonder la scène de la France.

 

Cette œuvre nous montre le naufrage, dans une île habitée seulement par des anciens esclaves, qui ont échappé de leur maîtres il y a un centaine d’années, d’Iphicrate et Arlequin, ce dernier esclave de l’autre et comment Arlequin va refuser d’ être l’esclave d’ Iphicrate.

 

 L’extrait à étudier nous renvoie à la première scène de l’œuvre, donc, la scène d’exposition où les deux personnages principaux, Arlequin et Iphicrate se trouvent sur l’île juste après le naufrage.

 

Aussi, nous nous demanderons quelles sont les particularités de cette scène d’exposition.

 

Pour ce faire, nous allons tout d’abord analyser le cadre spatiotemporel qui nous est présenté, puis les symboliques des deux personnages pour finalement analyser comment cette comédie s’installe sur un registre polémique.

 

 

 

Comme toute scène d’exposition, cette-ci  nous présente un cadre spatiotemporel. Dans ce cas, le cadre spatiotemporel a une importance énorme puisqu’il a plusieurs spécificités  qui permettent le bon déroulement de l’œuvre.

 

En fait, l’époque où se situe la pièce n’est jamais précisée, et on a seulement quelques traces qui permettent d’avoir une idée très floue du temps où se déroule la pièce. Les indices de l’esclavage en Grèce peuvent faire allusion à la Grèce Antique, où l’esclavage était le principal système de travail : l. 20 « Ce sont des esclaves de la Grèce révoltés contre leurs maîtres » ; l.68 « Dans le pays d’Athènes, j’étais ton esclave ». Ainsi, ce flou positionnement historique de la pièce lui donne à la fois à cette-ci une certaine séparation de la réalité (propre de la comédie) mais aussi une possible allusion indirecte du monde contemporain, qui permettrait éventuellement une critique de la société ou l’ordre social de l’époque.

 

Tout d'abord, ces personnages viennent d’Athènes, terre plusieurs fois nommée. Or, cette terre n’est pas par hasard la terre d’origine des deux personnages, puisqu’ elle est le centre de la Grèce et la civilisation antique occidentale et le lieu d’origine de la notion et l’application de la démocratie. Ainsi, en ayant comme seule référence spatiale réelle cette cité d’Athènes, ce qu'elle représente symboliquement est aussi mis en avant.Pour situer cette pièce dans l’espace, on trouve des indices plus précis qui situent la scène dans une île fictive, l’ « Île des Esclaves » : l.17 « Nous sommes seuls dans l’Île des Esclaves ». Déjà, le fait qu’ils soient dans une île permet une séparation de la réalité. Par ailleurs, cette île est difficile d'accès puisque les personnages n'y accèdent qu'après un naufrage.  En plus, cette île est très particulière : l. 20-21 « Ce sont des esclaves de la Grèce révoltés contre leurs maîtres, et qui depuis cent ans sont venus s’établir dans une île ». Cette île est donc dominée par des esclaves.on peut donc imaginer que ce lieu peut représenter, à sa manière, un lieu utopique

 

Ainsi, cette séparation de la civilisation occidentale provoquée par le cadre spatiotemporel permet l’installation d’un monde idéale, voire une utopie, où des idées différentes à celles de l’ordre social instauré peuvent facilement se montrer.

 

Une fois présentées les caractéristiques du cadre spatiotemporel de cette pièce, nous pouvons présenter les personnages et ce qu’ils représentent pour retrouver les éléments qui rendent cette scène d’exposition particulière.

 

 

 

Cette scène d’exposition nous présente deux personnages principaux, Iphicrate et Arlequin, chacun avec un nom qui nous donne des indices sur ses caractéristiques et sur le déroulement de l’œuvre.

 

Premièrement,  Arlequin nous renvoie au personnage de la Commedia dell’arte, l’Arlequin. Ceci, d’origine italien, représente à la fois, de forme superficielle, un personnage très comique, pas très intelligent, une sorte de bouffon. Or, il a aussi un côté qui nous montre son intelligence et sa ruse, même un côté diabolique, quand il sera associé avec la figure démoniaque de « Hellequin », un diable de la tradition française qui donne son nom à ce personnage. Ainsi, dans l’œuvre nous nous trouvons face à un serviteur qui va paraître un fidèle serviteur de son maître mais va puis changer sa position ( ce qui nous montre les deux faces de l’ Arlequin) pour refuser d’être l’esclave de son maître.

 

Puis, le personnage d’Iphicrate nous permet, par étymologie de sortir des conclusions par son nom. Iphicrate veut dire en grec, « quelqu’un qui gouverne par la force », notion qui peut se trouver en lien avec le personnage, qui se trouve en dessus de son esclave rien que pour le fait d’avoir naître « supérieur », mais pas par des mérites propres. Ainsi, la position d’un être humain par-dessus d’un autre que par le fait de naître et remise en cause de forme très légère et implicite mais présente.

 

Propre de la comédie classique est un bouleversement de la relation maître-valet, mais que n’arrive pas à être une mise en cause de l’ordre sociale, mais reste dans le carnavalesque et le jeu. Néanmoins, dans cette œuvre on peut trouver une certaine mise en cause qui fait passer cet extrait par le registre polémique.

 

Effectivement, on trouve un classique bouleversement des attitudes lorsque Arlequin ne va plus obéir son maître et va finalement se séparer d’Iphicrate, en passant par les répliques et par le jeu (didascalies) : l.32 : « siffle » ; l.35 « distrait, chante » ; l.37 « riant ». En plus, Arlequin se moque d’Iphicrate par l’ironie, en montrant qu’il a perdu le respect pour lui : l.37  « je vous plains, par ma foi ; mais je ne saurais m’empêcher d’en rire. »

 

Puis, on trouve la proposition d’Arlequin sous la nouvelle vie, où par les temps verbaux on note clairement ce qu’il laisse dans le passé, ce qu’il cherche pour le futur et ce que serait un monde idéal parfait l. 67 « Je l’ai été » ; l.68 «  Dans le pays d’Athènes, j’étais ton esclave ; tu me traitais comme un pauvre animal, et tu disais que cela était juste parce que tu étais le plus fort ».  Dans ce passage, on note qu’Arlequin laisse clairement dans le passé et donne une finalisation à la culture d’Athènes par le plus-que-parfait et l’imparfait.

 

Ensuite, par les temps futurs il va présenter à Iphicrate la nouvelle situation : l.70 « tu vas trouver ici plus fort que toi, on va te faire esclave à ton tour ; on te dira aussi que cela est juste, et nous verrons ce que tu penseras de cette justice-là ; tu m’en diras ton sentiment […] Quand tu auras souffert, tu seras plus raisonnable ; tu sauras mieux ce qu’il est permis de faire souffrir aux autres. » En effet, il cherche à faire de la relation passé-futur la relation de différence dans leur relation, qui va changer de sens

 

Finalement, Arlequin par l’usage du conditionnel nous présente la situation idéale du monde : l. 73 «  Tout en irait mieux dans le monde, si ceux qui te ressemblent recevaient la même leçon que toi. ». Ici, on trouve une hypothèse utopique, et que réellement met en cause l’ordre social en dénonçant la souffrance des esclaves à cause de leurs maîtres.

 

 

Pour conclure, on peut dire que cette scène d’exposition accomplit bien son rôle et nous présente une situation particulière, avec des caractéristiques comme le cadre spatiotemporel  et les symboliques des personnages qui nous anticipent un bouleversement de la relation entre Iphicrate et Arlequin. Or, ce bouleversement va au-delà du simple bouleversement de la comédie classique et remet vraiment l’ordre social.

 

Ainsi, on nous donne des indices à penser à l’égalité des personnes et au droit d’avoir le choix pour travailler, qui vont inciter plus tard la fameuse Révolution Française.